Communications CMAQ
Thierry André, d'une simplicité élégante
Entrevue CMAQ avec Thierry André, luthier, facteur d'instruments et membre artisan professionnel du CMAQ
Photos > Jean Fitzgerald. Photos fournies par Thierry André
CHAUDIÈRE-APPALACHES
Thierry André fabrique des guitares au design époustouflant depuis des années 1990. Il les fabrique à partir de différents matériaux et formes pour créer diverses sonorités de plus raffinées. Ses créations de grande qualité ont une signature bien à lui qui harmonise art, métiers d'art et science acoustique. Et ce, comme le souligne André Brunet, « dans une simplicité élégante ; ses instruments frappent à la fois par leur beauté visuelle et leur qualité sonore. [Dans ses designs], chaque détail compte, notamment lorsqu'il s'agit de toucher, de son, de réactivité ».
Établi depuis peu à St-Jean-Port-Joli, Thierry André est bien reconnu dans le domaine de la lutherie contemporaine autant à l’échelle du pays qu’à l’international. Pour lui, « l'art est un facteur adoucissant de la vie. Il a la même fonction qu'un petit bonjour franc échangé entre voisins; les deux ne semblent pas être absolument nécessaires à notre survie... mais finalement ils rehaussent chacun notre expérience quotidienne.
Fort d’une vie tout en création, pour lui, « l'art est présent partout, sous forme de design, d'architecture, d'expression sociale ; c'est la créativité amenée aux idées, à la parole, aux objets, à notre environnement. Il suffit souvent d'en manquer pour se rendre compte de sa réelle présence. »
André est récipiendaire de plusieurs prix d’excellence et bourses en métiers d'art, dont le prestigieux prix Jean-Marie-Gauvreau (JMG). L’équipe du CMAQ prend des nouvelles du lauréat du prix JMG de 2020.
Q: Comment avez-vous entendu parler du prix JMG en 2020 ?
R: En 2007, j'ai été finaliste pour le prix François-Houdé, qui célèbre les débuts d'une la pratique en métiers d'art. J'avais alors une vague idée qu'il y avait un prix pour une carrière plus soutenue ; un truc qui s'inscrit dans la durée. Le tout me semblait inaccessible à l'époque.
Douze ans plus tard, quand ma petite fille est née, j'ai voulu faire une œuvre pour célébrer sa naissance. Une fois faite, je me suis rendu compte que je venais aussi d’offrir un cadeau à ma pratique ; j'étais allé avec cœur au bout d'une idée, et j'avais maintenant une œuvre principalement expressive à partager. Puis en 2020, il propose sa candidature pour le prix JMG.
Q: Qu’avez-vous développé comme projet grâce à votre bourse ?
R: Le prix a été réinvesti dans ma pratique. J'ai acheté quelques outils, du bois pour la lutherie, etc. De façon générale, les prix et bourses aident l'artiste à avoir une vision plus large des actions qui sont réellement possibles. D'avoir un peu de moyens donne des horizons.
C'est très marquant, très important, de pouvoir au moins une fois créer sans trop se soucier du – combien -. Ensuite le chemin est ouvert... et puisqu'on l'a déjà emprunté, c'est plus facile de s'y retrouver même avec les contraintes.
Psst : Artisan(e) professionnel(le), par ici pour postuler au prix Jean-Marie-Gauvreau 2022 →
Q : Comment ce prix en métiers d’art a eu une incidence positive dans votre carrière ?
R : Pour être un luthier qui est reconnu surtout à l'international et dans un marché passablement spécialisé, c'est une belle expérience d'être célébré au Québec, surtout en étant récompensé par mes pairs des métiers d'art. Que mon travail puisse toucher aussi quelqu'un qui fait de la céramique, des bijoux, des vêtements... Le tout me dit que je travaille avec un langage créatif qui fait du sens et agit à différents niveaux.
Que ce soit pour le milieu de la guitare, ou plus largement pour mettre en valeur l'objet fabriqué à la main, l'équation d'ensemble entourant la transformation de la matière est viable dans la mesure où elle est pleinement partagée. Le tout est toujours à améliorer... Entre le travail sur l'objet et sa vente, il y a des dizaines de tâches différentes à accomplir et l'apprentissage est constant.
50% de mon travail n'a rien avoir avec dessiner, sculpter du bois, ou faire les réglages sur une guitare... Mais pour que je puisse arriver à faire ça, je suis prêt à encaisser les formulaires de déclaration de douanes, la comptabilité, les trucs moins sympathiques.
Q: Une bonne nouvelle à partager ?
R: Mon premier atelier permanent en carrière! Cette année, ma famille et moi on intègre notre première maison avec atelier indépendant, terrain et vue sur le fleuve, à St-Jean-Port-Joli QC. C'est très différent de la ville; aucun problème de stationnement, plus de locaux commerciaux à louer et l'atelier est à 40 pieds de distance de la maison.
Je rénove actuellement l'atelier, qui n'a jamais été chauffé ou isolé. C'est un bon bâtiment en pièce-sur-pièce assez costaud. C'est très gratifiant pour le manuel en moi de faire apparaître des fenêtres où il n'y en avait pas, de décider ou je fais le trou pour ma porte, ou je mets l'escalier... J'y ai trouvé une planche de cèdre...vieux...gris-noir et dur, incroyablement acoustique. C'est certain que je fais une guitare avec ça! J'ai déjà hâte de la jouer.
Œuvres de Thierry André par ordre de parution :
- Maya (2015). Guitare basse acoustique et micro magnétique.
- Guitare-fruit Wurcer (2018) Guitare acoustique caisse ronde (calebasse) avec coupe ergonomique.
- Kouai (2014) Guitare corps chambre et micro magnétique.
- Multi (2015) Guitare-harpe multicorde.
- Sun, Moon, and Vibrations (2019). Guitare acoustique caisse ronde allongée, monocoque, avec micro interne.
- Old-school Archtop (2017). Guitare acoustique
Pour aller plus loin
Écoutez l'épisode 3 de de la websérie Tout un bagage, Martin Léon initie une sympathique rencontre entre le musicien Louis-Jean Cormier et le luthier Thierry André >.